Note de lecture de Jacqueline Persini sur La terre n’apparaît qu’une fois traversée  à lire dans le n°86 revue Poésie Première ou ici :

Dans la connivence de leurs deux rives (peinture et poésie), Myriam Eck et Philippe Lepeut nous offrent leur traversée, nous invitant à poser un regard neuf sur les choses qui ne sont banales qu’en apparence.

Le recueil est composé de deux parties. La première est constituée de onze aquarelles colorées aux mêmes formes : morceaux de terre ? sur lesquels, au feutre noir, la poétesse a inscrit sur un calque des petits poèmes. Dans la 2ème partie, on retrouve les mêmes phrases et d’autres encore qui semblent « agrandir ce qui n’a pas de bord ». Qu’est-ce qui insiste, se poursuit, nous poursuit dans ces répétitions de formes et de mots ?

Myriam Eck construit son chemin de terre et d’eau, comme pour sonder le vide, tenter de trouver une adresse à son regard qui est avant tout geste. « Le regard donne sa main à ce qui le touche ». Les gestes du poète, du peintre s’allient pour explorer le visible et l’invisible. A la fixité du papier, s’opposent les mouvements de l’eau qui dissout mais aussi « contient toutes les traces possibles ». Ce qui est sec peut prendre ou reprendre vie. Ce qui est recouvert parvient à apparaître. Et c’est dans la traversée de la terre, de la nuit que se profilent des transformations inattendues. Reviennent sans cesse les mains qui cherchent un sol (un corps ?) où se déposer, respirer, être ? Elles rassemblent ce qui est dispersé, appellent la fluidité de l’eau, la mémoire des traces mais aussi l’oubli qui en fait partie. « Une trace se dissout dès qu’elle trouve sa mémoire ». Dans l’extrême dépouillement des poèmes, de grands silences laissent un bel espace aux lecteurs incités à faire leur propre chemin.  N’est-il pas essentiel de prendre corps, de penser le temps, la trace, le bord ?